prévention personalisée systémique

Prévention personnalisée, approche systémique



D'après un article du Docteur Marc Dumont paru dans la revue Santé Intégrative et actualisé par le Docteur Philippe Tournesac

 

La prévention personnalisée est le résultat d’une réflexion complexe pour le patient et le médecin, prenant en compte les symptômes aussi bien que les éléments dissimulés.


  Le symptôme révélateur de trouble fonctionnel

Le petite Larousse définit le symptôme comme « un phénomène qui révèle un trouble fonctionnel ou une lésion », il étend cette définition au sens figuré à un indice ou un présage. Ces révélations ou indice ont une réalité car nous avons une conscience. Ils nous informent sur le fait que notre capacité d’adaptation spontanée et inconsciente est dépassée. Comme les fusibles, notre capacité d’adaptation ne peut plus jouer son rôle quand il y a surcharge. Les symptômes sont donc, l’émergence, dans la conscience d’un individu, d’une surcharge des fonctions habituelles de l’organisme, aussi appelé surcharge fonctionnelle. L’information de cette surcharge au niveau corporel une fois reconnue par le système nerveux périphérique est transmise au cortex cérébral. Le cerveau se soustrait à cette règle puisqu’il n’est pas innervé. 

Les symptômes, motifs de consultation ainsi qu’expression du dépassement de nos capacités d’adaptation, doivent amener à une décision, puis à un comportement réfléchi du médecin et du patient. 


L’adaptation dépassée ou surcharge fonctionnelle est directement liée à l’instabilité.

Une forme de stabilité est nécessaire aux êtres vivants, et à leurs constituants notamment les cellules. Elle est la condition pour qu’il puisse s’adapter et aller de l’avant… Toutes les structures de l’univers, des ensembles de particules aux êtres vivants sont parcourues par des interactions internes. Isolées, elles ne peuvent être stables puisque les mouvements internes entrainent une déperdition progressive d’énergie. Une stabilité transitoire s’acquiert par des échanges avec l’extérieur, qui permettent de compenser les interactions internes déstabilisantes. Ces équilibres sont qualifiés d’états stationnaires dynamiques : la structure est stable à un niveau d’observation, mais siège d’instabilité dans les niveaux sous jacents d’observation. Nous sommes ainsi connectés de manière permanente, diffuse et non spécifique avec notre environnement, seul moyen de nous y adapter. L’environnement est donc un élément essentiel de notre stabilité.


Du symptôme  à la maladie : passons par la biologie

L’organisation d’un ensemble de symptômes en une maladie est donc le résultat d’une surcharge d’une partie de l’organisme, celle-ci se sur adapte en échappant de plus en plus à la physiologie et en soumettant notre organisme à des contraintes de plus en plus fortes.

Le symptôme peut être assimilé à la partie apparente de phénomènes complexes. Il existe toujours une partie cachée ou inconsciente même en l’absence de symptôme. Avant l’arrivée du symptôme il importe de dépister des carences altérant les capacités d’adaptation  ou les signes biologiques montrant que certaines fonctions ne sont plus dans leur état optimal.


Vieillissement et latence des maladies

Si la question de l’objectivation de la partie immergée de l’iceberg ou surcharge se pose à la suite de symptômes, elle est présente tout au long de la vie d’un individu, qui, à défaut de tomber malade, vieillit prématurément.

La période de latence moyenne des maladies, période infra clinique sans symptômes continus, mais pendant laquelle des poussées symptomatiques peuvent être présentes, est de l’ordre de 15 à 20 ans. Curieusement, cette durée est aussi celle de la première étape du vieillissement pour devenir adulte. Cette latence dépend de la vitesse de multiplication des cellules. Les cellules sanguines se multiplient de façon beaucoup plus rapide, leur latence est de cinq ans. Cette période doit être mise à profit pour élaborer une prévention personnalisée.


Motivation et prévention

La motivation du patient comme du médecin ne doit plus être uniquement symptomatique ou prépondérante émotionnellement, et mais basée sur la prise de conscience décidée et réfléchie d’un risque potentiel futur.

Il s’agit de raisonnements évaluant des risques individuels pour éviter qu’ils ne se concrétisent, et donc pour l’individu le gain ne peut être tangible : la réalité de la prévision n’est objectivée que par la faillite de la prévention ! 

Une bonne prévention empêche la maladie d’apparaître, il devient alors difficile de démontrer l’effet de cette prévention. La bonne prévention d’un infarctus est celle qui permet de ne jamais en avoir. Comment démontrer dans ce cas que ce résultat n’est pas le fruit du hasard ?



Mécanisme de la surcharge fonctionnelle à l’origine des maladies et de leurs prémisses.

La charge fonctionnelle, puis la surcharge ou adaptation dépassée, sont la résultante du mode de communication interne particulier de nos cellules qui permet de nous adapter à des environnements variés. Les mécanismes nécessaires pour faire fonctionner une cellule minimale nécessitent 300 gènes environ sur les 30000 à 50000 contenus dans une cellule. Avec ce petit pool de gène nos cellules gèrent leur métabolisme de base. En raison de leur instabilité potentielles certaines cellules vont se différencier et développer des propriétés particulières. Cette différenciation fait de nous des êtres multicellulaires. Ceci nous a rendus capables, grâce à la spécialisation d’environ 250 types cellulaires de décomposer et discriminer, tels des prismes, l’ensemble des éléments de notre environnement intérieur et extérieur (température, pression, molécules, microbes, formes, etc…..). 


L’individu et son environnement

L’histoire de notre évolution est inscrite dans nos cellules et en particulier son noyau. Cette histoire fait que nous sommes bien plus qu’une simple juxtaposition de cellules. L’organisation de ces cellules obéit à des règles précises issues de notre histoire et donc inscrites dans nos chromosomes. La topographie débute par la mise en place de notre forme par l’embryogenèse ou morphogenèse. Cette différenciation initiale, génétiquement déterminée, aboutit à l’archétype de l’espèce.

A la naissance, débute l’individuation par l’intégration continue des stimuli de l’environnement (flore bactérienne intestinale et aliments en premier, stimuli cognitifs en fin d’échelle évolutive). Cette intégration, qui passe nécessairement par les voies préétablies par la différenciation génétique, est une adaptation continue de ces voies biologiques.

L’individuation est ainsi une différenciation dans la continuité de la précédente. Elle n’est plus génétique mais épigénétique.

Autour du noyau cellulaire nous trouvons le cytoplasme. Les cellules ont des expansions qui les interconnectent les unes aux autres pour former le réseau cytoplasmique. Il est constitué de messagers et de molécules reliées les unes aux autres formant une espèce de squelette : le cytosquelette. Ceci est commun à l’ensemble des cellules, ce qui permet une adaptation ou réponse coordonnée de l’organisme grâce aux liens tissés entre les diverses fonctions différenciées de l’individu. Ce réseau permet de recomposer un événement externe à partir des diverses composantes perçues par le prisme de la différenciation de nos cellules. Cette capacité à recomposer un événement externe avec ses multiples dimensions et particularités est essentielle à notre capacité d’adaptation. En l’absence de cette capacité, nous ne serions qu’une symbiose, uniquement adapté à un biotope ou un environnement défini. 

Ces voies convergentes cytoplasmiques établissent ainsi un lien permanent et diffus de l’individu avec son environnement mais aussi avec lui même. On présente trop souvent un modèle de cellules présentant des récepteurs spécifiques qui quand ils sont stimulés entrainent une réponse spécifique. Ce modèle, utilisé pour décrire les phénomènes à l’échelle microscopique ne décrit donc pas la réalité des faits quotidiens. Dans cette réalité, c’est la perception d’une fluctuation quantitative des liens diffus qui va être interprétée alors comme la survenue d’un événement externe ou interne. 

Si ce réseau cytoplasmique établit une connexion suffisante entre nos diverses parties pour nous donner une certaine unité. Certains ensembles cellulaires forment des sous unités que l’on appelle système cellulaire. La charge fonctionnelle d’un système cellulaire est le résultat du cumul depuis la conception non seulement de l’effet de sa fonction propre mais aussi de ses relations avec les autres systèmes de l’organisme.


De la surcharge à la maladie

La différenciation individuelle amène à la maladie quand elle n’est pas intégrable dans l’organisation biologique de l’espèce : cette intégration nécessiterait un changement du plan de notre organisme, ce serait alors une tentative d’évolution.

C’est ce qui se produit dans les maladies qui sont des atteintes à notre intégrité ! Un ou des mécanismes pathologiques puis une maladie deviennent des « hernies » qui déforment peu à peu jusqu’à la rupture « la surface des sphères presque parfaites » sur laquelle évolue notre biologie: la communication biologique interne se fait en effet à l’infini dans des circuits qui doivent restés bouclés sur eux-mêmes pour y digérer les stimuli externes. 

Le fonctionnement habituel des cellules ou système de cellules est relativement constant, les variations se font dans un créneau limité. Toute différenciation se fait hors de ce créneau, à un certain moment il ya  un  franchissement de seuil. Cette évolution ne se fait pas de manière progressive car il s’agit de passer d’un équilibre à un nouvel équilibre. Elle est par contre précédée d’une étape progressive de préparation. L’effet de seuil est du à un mode de communication non linéaire à tous les niveaux dans et entre les cellules. Non linéaire signifie que ce mode de communication permet des effets qui ne sont pas proportionnel à la cause. Une petite modification peut avoir des impacts majeurs alors que des grands bouleversements seront absorbés avec peu de conséquences. 

Cette non linéarité est due à plusieurs mécanismes d’une part les membranes qui permettent de limiter la diffusion et de moduler les concentrations des différentes molécules. Par ailleurs au niveau des cellules elle vient aussi des boucles de rétroaction négatives ou amplificatrices. C’est à dire que certaines réactions seront rapidement inhibées alors que d’autre une fois établie nous font entrer dans une spirale accélératrice. 

De cet effet de seuil résulte un mécanisme de mémoire. Le retour en arrière spontané n’est pas possible il nécessite une action sur la régulation interne de l’organisme.



Le réseau cytoplasmique, au centre de la réponse adapatative

Le réseau cytoplasmique qui rappelons le contient les seconds messagers et cytosquelette, vers lequel converge la réponse aux récepteurs membranaires, est commun à toutes les cellules différenciées. Il nous unifie, établit un lien permanent et diffus avec l’environnement et notre milieu interne, alors que les membranes cellulaires, intracellulaires, les basales qui séparent les tissus, cloisonnent. 

La réalité des faits quotidiens est qu’une perception d’une fluctuation quantitative de ce lien diffus, le réseau cytoplasmique, est reconnue comme la survenue d’un événement externe ou interne. En effet, les cellules différenciées perçoivent telles des prismes les composants de notre milieu externe et interne, le réseau cytoplasmique permet de quantifier et de recomposer cet événement par la transmission de ces diverses perceptions vers l’ADN et l’interférence des messages sortant qui s’en suit entre les cellules différenciées du fait des liens créés par ce réseau.

Ce réseau a bien sur des propriétés de réseau décrite dans les théories des systèmes La réponse n’est pas prédéterminée. Des changements drastiques sont possibles si l’on change les conditions initiales de son interaction. Robustesse, dans un certain intervalle des conditions environnementales le réseau est robuste. L’apprentissage continu permet une stabilisation. 

Cette « méthode non déterministe » permet l’adaptation au niveau du groupe mais aussi des réponses inadaptées à un individu, maladies et leurs prémices, suite à la surcharge fonctionnelle d’un système cellulaire sous l’effet de sa fonction propre mais aussi de celles des autres systèmes en raison de l’existence de ce réseau.


Pratique de la prévention personnalisée

La pratique de la prévention personnalisée demande de voir autrement les symptômes et les maladies puis de définir l’étape entre santé et maladie : la surcharge fonctionnelle et son mécanisme. Il faut maintenant définir une méthode d’évaluation de cette surcharge. Ceci nécessite de prendre en compte quatre données principales. 


  • Première donnée, l’état d’un système reflète sa fonction propre comme ses relations avec les autres systèmes : En raison du réseau cytoplasmique, la charge fonctionnelle d’un système cellulaire dépend de sa fonction propre comme de ses relations avec les autres systèmes cellulaires différenciés. 
  • Deuxième donnée, le choix des paramètres : Pour évaluer un état de santé, il s’agit que de paramètres non spécifiques mais possédant certaines caractéristiques. Un paramètre spécifique n’évalue qu’un détail d’un système, son intérêt en matière de prévention est tout à fait mineur.  On choisira donc des paramètres pour lesquels
  • La variabilité est connue et maîtrisée, tant au niveau individuel que dans la population. 
  • On dispose de connaissances suffisantes et étayées sur leur rôle physiologique.
  • Il faut définir une zone de « normalité ». Il s’agit de l’évaluation d’un écart acceptable à la moyenne. La question du maximum en plus ou moins tolérable se pose.
  • S’agissant de paramètres par définition non pathologiques à titre isolé, leur interprétation et leur signification pathogénique ne peut venir que par leur regroupement. Des variations de plusieurs paramêtres augment la puissance donnée à l’interprétation. Nous devons donc recourir à des bilans multiparamétriques, qui doivent être des reflets suffisamment fidèles du fonctionnement des systèmes biologiques de l’organisme : systèmes déjà décrits ou dont la physiologie est encore à décrire, comme le système génétique. 
  • Troisième donnée : la complexité peut être approchée avec quelques paramètres
  • La théorie mathématique des systèmes montre que la description de leur fonction se fait par la détermination de leur(s) attracteur(s).
  • Ce sont des volumes où évoluent leurs paramètres fonctionnels dans le temps. Ces systèmes possèdent de très nombreux paramètres.
  • L’évaluation de tous est impossible.
  • La complexité de ces attracteurs peut par contre être approchée en évaluant quelques paramètres choisis. 
  • Enfin Quatrième et dernière donnée : L’étude de l’évolution du vivant montre que certains systèmes biologiques ont joué des rôles cruciaux. Le métabolisme chez les bactéries, le système endocrine avec production d’hormones chez les végétaux, apparition du système immunitaire spécifique chez les vertébrés, système neuromusculaire du monde animal évolué.


La biologie fonctionnelle

La biologie fonctionnelle systémique sous forme de bilans multiparamètriques est donc la méthode idéale pour évaluer la surcharge fonctionnelle, guidée dans l’interprétation et dans ses choix par l’histoire personnelle et familiale du patient.

Le profil des acides gras pour le métabolisme des graisses et des sucres.

Le profil des acides aminés pour l’évaluation du métabolisme protéique

Le profil endocrinien (oestrogènes, progestérone, testostérone, cortisol, DHEA)

Le profil protéique et le profil lymphocytaire pour le système immunitaire, et ses relations avec le système endocrinien  et l’état émotionnel ( pour le typage lymphocytaire).

Le profil des neuromédiateurs, qui sont en fait des neuromodulateurs, pour une approche de l’état émotionnel.

Le microbiote intestinal systémique pour sont impact sur le métabolisme, le système nerveux, le système immunitaire et le système endocrinien.



Glossaire

Epigénétique : dont l’information principale n’est pas contenue dans l’ADN.

Embryogenèse : démarre après la fécondation et mets en place les formes d’où son synonyme, morphogenèse.

Organogenèse : mise en place des organes, suit la morphogenèse.

Radicaux libres : petites molécules très réactives et donc agressives.

Second messager : se dit des molécules relayant les messages membranaires.

Cytosquelette : réseau tubulaire du cytoplasme.

Biotope : zone ou cohabitent par interactions de multiples organismes.

Symbiose : dépendance vitale entre plusieurs organismes. 

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