Spasmophilie

 Une  définition  pour  la  spasmophilie


Docteur Philippe Tournesac

                 Bien avant que je ne découvre l’association, il y a une quinzaine d’années, le Groupe de Recherche avait imaginé un questionnaire que l’on envoyait à tous les nouveaux adhérents spasmophiles et qu’ils devaient retourner rempli. Les premières réponses ont permis d’affiner le questionnaire. L’association comptait en1997 plus de 3000 adhérents et dont 2300 avaient répondu à ce questionnaire.

                  C’est donc à partir de ces très nombreuses réponses que nous avons sélectionné certains « items » et nous les avons testés pour nous assurer de leur fiabilité.


Le  diagnostic

                  Faire le diagnostic d’une maladie ou d’un syndrome est de première nécessité pour pouvoir prescrire un traitement approprié. Ceux qui parlent de spasmophilie énumèrent un nombre impressionnant de symptômes, à tel point que absolument personne ne peut échapper à l’un, même à plusieurs de ces symptômes. 

                 

                  On a longtemps fait le diagnostic par la mesure des réactions musculaires à une stimulation électrique : l’électromyogramme (emg). Beaucoup d’entre vous ont dû subir cet examen qui n’est d’ailleurs pas très agréable. Depuis la création des RMO (références médicales obligatoires) la Sécurité Sociale refuse que l’on pratique cet examen à des fins diagnostics de la spasmophilie.


La  spasmophilie,  un  terrain


On peut parler de spasmophilie sous différents aspects : crise, maladie, syndrome ou terrain. La notion de terrain spasmophile nous semble primordiale pour une bonne prise en charge. Cette notion de terrain découle de l’observation des éléments suivants : 

o    L’interrogatoire des spasmophiles met presque toujours en évidence des symptômes présents depuis la petite enfance. 

o    Ces symptômes ne sont pas présents en permanence aussi bien dans le temps que pour leurs localisations. 

o    La spasmophilie concerne l’ensemble du corps humain. 

                  Il est important de remplacer la notion de maladie par celle de terrain, car cela va déterminer une approche thérapeutique particulière. La notion de « terrain allergique » ou terrain atopique est bien acceptée. On peut parler aujourd’hui de « terrain spasmophile ».


La synthèse des informations de plus de 2000 questionnaires remplis par les nouveaux adhérents lors de leur  première adhésion nous a permis de retenir 13 items majeurs. Nous avons déterminé puis valider que la présence d’une majorité d’item déterminait le « terrain spasmophile » chez les adultes.

                 

Ce questionnaire a été établi pour être utilisé par des médecins mais la compréhension et la description des items permet son utilisation par presque tout le monde. Les questions ne se réfèrent pas uniquement au présent mais à l’ensemble du passé et du présent de la personne interrogée. Le questionnaire est divisé arbitrairement en 2 parties qui font suite aux divisions du « grand questionnaire » initial. 


PREMIERE PARTIE :

·       « Crampes, fourmillements dans les jambes, les bras, les mains, le visage ». Ces symptômes traditionnels sont faciles à reconnaître. On peut exclure les fourmillements secondaires à des maladies neurologiques graves (SEP, polynévrite…) et les fourmillements localisés unilatéraux secondaire  à une compression transitoire (jambes croisées, position pendant le sommeil)

·     « Spasmes au niveau de la gorge ». C’est la traditionnelle « boule » dans la gorge, la sensation d’avoir la gorge serrée. Ce sont aussi les troubles de la déglutition appelés en médecine dysphagie hautes.

·     « Spasmes gastriques ». Avez-vous souffert de crampes ou de noeud à l’estomac, avez-vous eu de l’aérophagie ? Avez-vous eu des éructations ? La sensation de brûlures épigastriques rythmées par les repas doit faire rechercher une ulcération gastrique. 

·     « Spasmes intestinaux, colites, ballonnements ». Colopathie, colique digestive : douleurs spasmodiques du côlon ou de l’intestin grêle. Ballonnements abdominaux quelles que soient leurs localisations. 

·     « Spasmes de l’utérus ». Cette question exclusivement féminine fait rechercher des douleurs pelviennes avant ou pendant les règles. Etant donné que ce questionnaire concerne autant le passé que le présent elle doit être posée aux femme ménopausées autant qu’au femmes non ménopausées. 

·     « Crispation des mâchoires avec tension au niveau des mâchoires ». Il est parfois utile d’interroger le conjoint ou le dentiste à la recherche d’un bruxisme (grincement ou frottement des dents nocturne ayant en général pour conséquence une usure prématurée de certaines dents)

·     « Les douleurs musculaires et articulaires ». cette question volontairement peu précise regroupe des douleurs aussi bien rachidiennes que des articulations périphériques et des douleurs musculaires dorsales, cervicales et des membres.

·     « Phosphères, Acouphènes ». Cette appellation médicale correspond pour les  phosphènes aux scintillements, mouches devant les yeux et pour les acouphènes aux sifflements et  bourdonnements d’oreille.  Les personnes ayant des migraines ophtalmiques devront être soumise  à ce questionnaire  à la recherche d’un terrain spasmophile.


DEUXIEME PARTIE

·     « Asthénie paradoxale », c’est-à-dire la fatigue du matin supérieure à celle du soir : « être plus du soir que du matin ». Ce symptômes souvent rattaché à la dépression pour les psychiatres peut être lié à une difficulté  à supporté les changements de rythme de vie, caractéristique du spasmophile. L’asthénie paradoxale correspond aussi aux personnes dont la sensation de fatigue augmente avec la durée du sommeil : « plus je dors plus je suis fatigué ».

·     « Tachycardie, extrasystole, éréthisme cardiaque » sensation de battement cardiaque rapide ou irrégulier. Les extrasystoles sont souvent ressenti par le patient comme une pause ou un « arrêt du cœur » (très bref). Je rappelle pour les médecins et cardiologues que la ballonisation de la valve mitrale est un signe presque caractéristique de spasmophilie.

·     « Oppression respiratoire ». Il faut inclure toutes les perceptions de gènes respiratoires, y compris les asthmatiques.

·     « Troubles du sommeil ». C’est un très vaste problème qui concerne tout à la fois l’endormissement, les réveils au cours de la nuit et les réveils précoces mais aussi les excès de sommeil supérieurs à neuf heures par jour.

·     Enfin, « la sensibilité excessive à l’environnement ». celle liée à une trop forte lumière, aux bruits (celui par exemple des appareils électroniques, aux cris des enfants...), à la télévision, aux micro-ordinateurs, aux saisons, aux changements d’horaire. 


Le terrain spasmophile est déterminé par un score supérieur ou égale  à 4/8 à la première partie et 3/5  à la deuxième partie. La présence de symptômes spasmophiles sans terrain spasmophile doit faire rechercher une pathologie d’un autre type. La présence d’un terrain spasmophile ne présume pas de l’absence ou de la présence d’une autre maladie. Ce diagnostic doit permettre d’adapter le traitement à l’individu et de conseiller une prise en charge thérapeutique que nous décrirons dans d’autres articles.


Examens biologiques et spasmophilie

Les examens biologiques sont un outil médical complexe. Leur interprétation et leur prescription nécessitent un avis spécialisé tenant compte du caractère unique de chaque individu. 


« Quel analyse de sang faut-il pratiquer chez les personnes spasmophiles ? », voici une question récurrente en consultation aussi bien que dans les réunions de thérapeutes. Comme il n’existe pas de travaux scientifiques dans ce domaine cet article est le fruit d’une réflexion et de 30 années de pratique médicale. Il faut distinguer les analyses permettant de diagnostiquer une maladie de celles utiles pour les personnes présentant un terrain spasmophiles tant sur le plan de la prévention, de la résolution de certains symptômes que du bien être. Aucun examen ne peut être proposé pour le diagnostic de terrain spasmophile. Pour mémoire ce diagnostic est basé sur l’interrogatoire avec la grille présentée ci-dessus.

 

Le magnésium, le potassium, le zinc et le fer ont des points communs qui les rendent particulièrement intéressant à évaluer biologiquement. Tout d’abord, ils sont  essentiels au fonctionnement cellulaire (énergétique, échange membranaire, réaction enzymatique, transport de l’oxygène) ensuite le pourcentage de la population exposé  à des déficits nutritionnels est très fréquent dans la population (plus de  70% pour le magnésium, le zinc et le potassium chez les hommes comme chez les femmes et d’environ les 2/3 pour le fer chez les femmes) enfin il existe des outils d’évaluation biologique peu coûteux et plutôt représentatifs pour chacun d’entre eux (magnésium érythrocytaire ou globulaire pour le magnésium, kaliémie pour le potassium, ferritine pour le fer et zinc sérique pour le zinc).

Les dysfonctions thyroïdiennes sont particulièrement fréquentes chez les femmes. La TSH : une hormone hypophysaire permet de dépister une grande majorité de ces troubles hormonaux. L’évaluation plus précise a été présentée dans le numéro 14 de Spasmagazine.

Le déficit en vitamine D ou plus précisément la 25OH-vitamine D3  impliqué dans les phénomènes douloureux, immunologiques, les troubles du développement osseux et musculaire. Le nombre de personne carencé en vitamine D est difficile  à évaluer dans la population en raison des variations saisonnières et d’un flou dans la définition de la norme. Les causes de déficit sont l’insuffisance d’exposition au soleil, les médicaments comme la pilule, le vieillissement, les maladies du foie ou des reins. Cela recouvre une très grande partie de la population mondiale.

Les anticorps anti-endomysium permettent de dépister les patients porteurs de maladie coeliaque.


La symptomatologie associée à une ou plusieurs des perturbations biologiques des éléments ci dessus va d’une simple fatigue  à des troubles du comportement en passant par des maladies immunologiques. Il est donc difficile de sélectionner une population ne devant pas être explorée. 


En prévention le dosage tous les  5 ans de la 25OH-vitamineD3 et de la ferritine me semble un minimum à proposer à une personne présentant un terrain spasmophile associé à un dosage de la TSH pour les femmes. Ces tests n’excluent pas tous les autres bilans utilisés en prévention. Ces mêmes tests peuvent être proposés en cas de décompensation brève ou récente s’ils n’ont pas encore été pratiqués.


En cas de décompensation ancienne ou prolongée l’ensemble de ces examens permet de démarrer les investigations qui pourront être complétés selon les cas par d’autres analyses, nutritionnelles, immunologiques, hormonales, neurologiques. (cf prévention)


En cas de perturbation, il faut prévoir un contrôle après traitement pour vérifier le retour dans les zones idéales pour la santé.



   


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